22,13 mètres. C’est la longueur vertigineuse d’un menu imprimé manuellement par Charles-Antoine De Sousa à partir de l’offre Uber Eats, scrappée à la main un midi ordinaire. Une œuvre-concept baptisée « MENU DU JOUR », qui interroge notre rapport au trop-plein algorithmique, à la fatigue cognitive… et à l’illusion du choix.
À 12h pile, un jour de semaine, le directeur de création s’est lancé dans un geste de recensement méthodique : collecter, un par un, tous les plats disponibles à la commande sur Uber Eats dans sa zone de livraison. Entrées, plats, desserts, sans distinction ni tri. Pas de hiérarchie, pas de filtre. Juste la liste brute, dans sa totalité.

Un menu total, archivé à la main, en une seule session de midi
Le résultat ? Un objet graphique d’apparence familière – un menu de restaurant – poussé à l’extrême, au point de devenir grotesque par sa démesure. En mimant le format d’un support convivial, ce projet révèle les paradoxes d’une abondance algorithmique qui fatigue plus qu’elle ne libère.
Trop de choix devient non-choix
Sous ses airs d’inventaire culinaire, cette installation explore un phénomène bien plus vaste : la saturation informationnelle. L’œuvre cristallise cette tension entre l’accessibilité infinie promise par les plateformes, et l’épuisement qu’elle génère. À travers un simple menu, c’est toute la densité invisible de nos interfaces numériques que l’artiste rend tangible.
Le créatif ne propose pas ici un hommage à la diversité gastronomique. Il dresse plutôt un portrait acéré d’un excès devenu la norme. Le menu devient carte, la carte devient carte mentale. Et trop de choix… finit par nous empêcher de choisir.
Un geste d’archivage obsessionnel pour matérialiser l’ère du trop
Loin d’un simple exercice de style, « MENU DU JOUR » se veut également document. Il capture un instant précis, un midi banalisé, une tranche algorithmique de nos appétits calibrés. En mettant à plat cette profusion, souvent invisible car filtrée, condensée ou résumée sur nos écrans, l’œuvre agit comme un miroir critique.
À la croisée de l’édition, de l’archivage, et du design spéculatif, ce menu hors-norme fait dialoguer art conceptuel et culture numérique. Il fonctionne à la fois comme image, comme critique, et comme trace. Trace d’un monde où l’excès n’est plus une exception, mais la règle.
L’occasion de vous (re)partager le projet de l’artiste Dima Yarovinsky, qui a représenté la longueur des Conditions Générales des réseaux sociaux avec 7 papiers de couleur, où sont imprimées les CGU de Facebook, Instagram, Snapchat ou encore Twitter.








