Et si un passage piéton pouvait raconter l’histoire des vies perdues sur la chaussée ? C’est l’idée percutante mise en œuvre à Tuzla, Istanbul, où un simple passage piéton a été transformé en tableau vivant des accidents. Chaque bande du passage illustre une année d’incidents au cours desquels des piétons ont été blessés ou tués, soit plus de 20 000 accidents recensés à travers la Turquie sur les 10 dernières années. Une intervention qui transforme un marquage routier banal en outil de prévention directement intégré à l’espace public.
La force de cette campagne repose sur une idée simple : faire du passage piéton lui-même le support de communication. Plutôt que de peindre de simples bandes blanches, les concepteurs ont intégré les données réelles d’accidents dans le design. Chaque ligne, chaque espace devient un graphique au sol, obligeant conducteurs et piétons à se confronter à l’ampleur du problème au moment même où leurs comportements peuvent changer.

Un langage visuel universel
Loin des panneaux d’affichage saturant déjà l’espace urbain, le projet choisit une approche directe et intuitive. Pas besoin de slogans tape-à-l’œil : le visuel suffit. Le langage graphique est compris de tous, sans traduction nécessaire, et rend visible ce qui reste d’ordinaire des statistiques abstraites. En intégrant ces données dans le flux quotidien de la ville, la campagne rompt avec la routine et incite à la vigilance là où elle est cruciale.
Une intervention inattendue, utile et humaine
Si cette initiative trouve un tel écho auprès du public, c’est parce qu’elle est à la fois inattendue et profondément humaine. En rendant tangibles les chiffres des accidents, elle transforme la sécurité routière en responsabilité partagée. Les passants ne traversent plus sur de simples lignes blanches : ils marchent sur la mémoire de milliers d’accidents évitables. Une manière de rappeler que chaque arrêt au passage piéton peut sauver une vie.
Cette idée est pensée pour être modulaire et réplicable. Chaque ville pourrait adapter ce principe en fonction de ses propres statistiques, et même enrichir le dispositif par des écrans d’affichage numérique actualisant les données en temps réel. Associée à des campagnes digitales — images avant/après ou cartes thermiques des zones à risque —, la portée de l’initiative peut s’étendre bien au-delà du trottoir.
Quand les données deviennent un outil de prévention
Au-delà de son aspect artistique et éducatif, le projet illustre comment la visualisation de données peut transformer l’aménagement urbain en levier de prévention. Plus qu’un simple avertissement, ce passage piéton devient un appel à l’action pour des villes plus sûres : ralentir, respecter les piétons et réduire les collisions. Une preuve que la créativité, alliée aux données, peut littéralement changer notre manière d’occuper la rue.
Et dans cet esprit de passage piéton détourné, nous vous invitons à (re)découvrir Volvo qui transforme un passage piéton en œuvre d’art… la plus ignorée au monde, avec l’artiste Subodh Kerkar.





