Dans les rues, les tags sont partout. Pourtant, rares sont ceux qui prennent le temps de les lire, ou simplement de les comprendre. Face à cette écriture codée que seuls les initiés peuvent déchiffrer, l’artiste français Mathieu Tremblin (@tremblinsays) propose une approche radicalement différente : réécrire les graffitis en typographie lisible, sans en trahir le message d’origine. Une démarche à la fois artistique et provocante qui questionne notre rapport à l’espace urbain.
Ce projet, baptisé “Tag Clouds”, a récemment refait surface sur les réseaux sociaux par le collectif WAVE, qui documente quotidiennement ce que fait la culture sous l’angle du sport, de la musique, de la mode ou encore de l’art. En mettant en lumière cette initiative singulière, le collectif met en valeur une réflexion plus large sur les langages visuels urbains et leur pouvoir de narration.

Un alphabet caché dans la ville
Dans le cadre de son projet, l’artiste parcourt les murs pour recouvrir les signatures des graffeurs, en les reproduisant sous une typographie standardisée. Le geste n’est pas anodin : il permet aux passants de lire ce qui, d’ordinaire, reste crypté. Comme des mots-clés dans une “cloud tag” numérique, ces graffitis prennent ici une forme plus lisible… tout en conservant leur mystère.
Mais cette intervention suscite aussi le débat, notamment dans la communauté du graffiti où recouvrir une œuvre (même pour la “traduire”) est perçu comme une transgression. Une tension assumée par l’artiste, qui revendique l’importance de cette friction pour questionner les règles implicites de l’espace public.


Une critique de la ville “optimisée”
Plus qu’un exercice de typographie, le projet interroge la manière dont la ville est gérée, organisée, parfois aseptisée. Pour Mathieu Tremblin, s’intéresser aux tags, c’est refuser de suivre les trajets balisés imposés par les flux économiques, politiques ou touristiques. C’est réintroduire de l’aléatoire, du personnel, de l’émotion dans une cartographie trop fonctionnelle.
Et surtout, c’est rappeler que la ville appartient aussi à ceux qui la marquent, qui y laissent une trace. Ou, pour reprendre les mots de l’artiste : “Ce ne sont pas les tagueurs qui s’approprient la ville… ce sont les tags qui lui appartiennent.”
Au-delà du street-art
Si ses performances évoquent immédiatement le street-art, le graffeur rejette cette étiquette, trop marketing à ses yeux. Selon lui, le terme a été instrumentalisé par le marché de l’art, reléguant les graffitis “sauvages” au rang de sous-culture. Lui préfère parler d’intervention urbaine critique, consciente de son environnement et affranchie des codes commerciaux.
Avec “Tag Clouds”, il signe une œuvre à la fois graphique, sociale et politique. Un projet qui transforme un mur en espace de lecture, et un graffiti en conversation. Et pour découvrir tous ses projets, n’hésitez pas à vous rendre sur son site internet et sa page Instagram.
Et pour rester dans l’univers du graffiti, nous vous invitons à (re)découvrir l’agence DUDE London, qui a transformé un tag réalisé sur sa façade en une police d’écriture baptisée “Revenge Font”, pour se venger avec créativité.















